jeudi 20 février 2014

Le génome : le livre de recettes d'un organisme, 3ième partie : les gènes

Troisième partie des explications sur le génome consacrée aux gènes, donc. Billet peu plaisant car là où il y a des gènes, il n'y a pas de plaisir.

*Tousse*

Bref.

Donc les gènes. On a vu précédemment de quoi était constitué un génome, ce grand livre de recette d'un organisme : les lettres fondamentales et le papier. Tout ça, c'est bien joli mais cela ne nous dit pas comment la faire cette blanquette de veau. En d'autres termes : comment est codifiée dans un génome l'information servant à la fabrication et la maintenance d'un organisme ?

Tout comme un livre de recette se décompose en plusieurs recettes individuelles, un génome se décompose en plusieurs gènes individuels qui se trouvent à différents endroits du génome.

Des gènes dans un génome...

Toujours tout comme le livre de recette (je vais user et user de cette métaphore à vous en faire devenir obèse), une recette va contenir l'information pour un plat en particulier, coder pour un plat pourrait-on dire, un gène va coder pour quelque chose, à savoir une protéine (ça peut être autre chose, mais je ne vais pas en parler aujourd'hui).

... qui codent pour des protéines.

Avant de voir comment cette information est encodée, voyons comment cela fonctionne.

Vous vous souvenez de la cellule et du fait que le génome se trouvait dans le noyau ?

une cellule

Et bien les protéines et toute la machinerie qui sert à faire fonctionner une cellule se trouvent dans le cytoplasme. Donc il faut faire transiter l'information génétique du noyau au cytoplasme.
De la même manière, le livre de recette de votre grand-mère, vieux, fragile et précieux, vous n'allez pas le sortir du placard et l'utiliser dans votre cuisine à la merci de toutes les tâches d’œuf, de sauce et d'huile possible. Non, vous allez le laisser dans le placard mais faire des photocopies des recettes qui vous intéressent (différentes selon les envies, les saisons et les invités) et travailler sur ces photocopies.
Ici le principe est rigoureusement identique. Le génome est fragile et important, donc la cellule va photocopier la séquence du gène dont elle a besoin, transférer la copie du noyau au cytoplasme, cette copie va être décodée pour fabriquer une protéine.

La photocopie est faite non pas d'ADN mais d'ARN (Acide RiboNucléique). Vu qu'il existe plusieurs types d'ARN, celui-là on va l'appeler ARNm pour ARN messager.
Schématiquement, ça donne ça pour le livre de recettes.

Comment cuisiner sans ruiner son livre de recette préféré...

1) photocopier la recette d’intérêt, 2) transférer la photocopie dans la cuisine, 3) utiliser les infirmations de la recette pour cuisiner le plat et 4) se régaler.
Ça va donner ça pour les gènes :

Comment produire une protéine...

1) copier la séquence du gène dans l'ARN messager, 2) transférer cet ARN dans le cytoplasme, 3) utiliser l'information de cet ARN pour fabriquer une protéine et 4), faire fonctionner toute la machine !

Maintenant un petit retour sur cet ARN messager, et plus particulièrement sur l'ARN en lui-même. Il est un peut différent de l'ADN, déjà pour la structure. Vous vous rappelez que la colonne vertébrale d'un brin d'ADN est le sucre (le désoxy-ribose dans ce cas) et bien c'est le même principe pour l'ARN sauf que le sucre est différent, c'est du ribose "normal" (d'où le nom d'ARN). Ensuite les bases sont différentes : les thymines ("T") sont remplacées par des uraciles ("U") (sans rentrer dans des détails qui vont être un peu ennuyeux, la structure chimique est là aussi un poil différente entre une thymine et une uracile). À la séquence d'ADN ATGCATGC correspondra la séquence d'ARN AUGCAUGC. Enfin, alors que l'ADN est double brin (deux brins en sens opposé), l'ARN est simple brin, lui (pourquoi faire compliqué). Sinon tout reste identique, y compris l'orientation du brin dans le sens 5' 3'.

Un autre truc. L'image de la photocopie que je manie à l’excès n'est pas superflue, elle est même fidèle à la réalité. Vous vous souvenez je vous avais dit que dans une hélice d'ADN, un "A" et un "T" se mettaient toujours ensemble, et un "G" et un "C" toujours ensemble. Ce principe marche aussi si vous couplez un brin d'ADN avec un brin d'ARN, avec la petite particularité qu'un "A" de l'ADN se mettra avec non pas un "T" (il n'y en a pas dans l'ARN si vous suivez) mais avec un "U" (alors qu'un "T" de l'ADN se mettra lui avec un "A" de l'ARN sans aucun soucis.

Donc alors comment on va copier la séquence d'un gène dans un ARNm. Ça va fonctionner en plusieurs temps. Je vous avais dit que deux brins d'ADN qui se mettaient ensemble formaient une belle double hélice. On va commencer par dérouler cette hélice mais pas toute l'hélice (sinon ça ferait beaucoup de boulot) mais seulement la région qui nous intéresse (le gène donc). Ensuite on va séparer les deux brins. Comme ça la machine à photocopier aura accès au gène (c'est un peu comme ouvrir le livre de recette à la bonne page et tenir le livre ouvert dans la machine.
En gros, ça donne un truc comme ça :

Comment photocopier un gène...

Vous remarquerez que le brin bleu sert de négatif pour copier la séquence du gène qui est sur le brin orange dans l'ARNm. Si on détaille la région du gène, ça va donner ça (avec toujours les deux brins d'ADN en orange et bleu et l'ARNm en rouge) :

La copie d'un gène dans l'ARNm

Vous voyez bien comment la séquence du brin principal (en orange) est copié fidèlement dans l'ARNm (en rouge) en se servant de la séquence de l'autre brin comme négatif.

Maintenant qu'on a vu le support physique de l'information génétique, voyons maintenant comment l'information est transmise de l'ARNm à la protéine.

Déjà un petit mot sur la protéine. Tout comme un brin d'ARN ou d'ADN ce sont des bases azotés qui se suivent, une protéine ce sont des acides aminés qui se suivent. Ce sont donc les briques fondamentales de constructions Lego plus complexes. Il y en a 20, de ces acides aminés (certains sont connus comme la lysine dans Jurassic Park il y a 21 ans, je viens de me donner un sacré coup de vieux).

Le principe ensuite est simple : c'est la suite des bases sur l'ARNm dans un gène qui va déterminer la suite des acides aminés. Alors là, si vous avez suivi, vous allez voir qu'il y a un organe reproducteur mâle (une couille, si vous préférez). Il y a 20 acides aminés mais seulement 4 bases. Comment qu'on fait alors ? Et bien c'est simple encore une fois, un acide aminé sera déterminé par non pas une seule (4 bases = 4 possibilités), ni même deux (4 bases * 4 bases = 16 combinaisons possibles) mais 3 bases d'ADN (4 bases * 4 bases * 4 bases = 64 combinaisons possibles).

Du coup, on parlera de triplet ou de codon pour parler des trois bases qui vont coder pour un acide aminé donné.
On peut illustrer ça comme suit. La séquence suivante pourra être vue comme composée de plusieurs codons, chacun identifié par une couleur différente.


La correspondance entre codons et acides aminés se trouve dans un tableau appelé code génétique.

Code génétique

Alors avant de continuer, un point ultra méga important qui me hérisse le poil. Il y a une grande différence Grande Muraille de Chine entre le code génétique et la séquence génétique. Le code génétique correspond au tableau de correspondance ci-dessus. La séquence génétique correspond à une suite de bases d'ADN. Donc quand dans un grand média vous entendez Pujadas (ou un/une autre) parler du code génétique, il est fort probable qu'il veut en fait parler de la séquence génétique mais se trompe comme une grosses buse.

Dans ce tableau, certains codons sont indiqués en vert comme initiation et en rouge comme terminaison. Ce sont en fait les codons qui vont indiquer respectivement le début et la fin du gène (précisément de la partie du gène qui code pour la protéine). Vous remarquerez aussi qu'il y a donc 64 codons possible pour 20 acides aminés. Du coup, certains acides aminés seront codés par plusieurs codons. On parlera alors de redondance du code génétique (avec quelques conséquences sur l'évolution dont je vous toucherai mot plus tard).

Pour simplifier, dans la fin de ce message, on ne parlera que de la séquence d'ADN pour un gène, pas de la séquence de son ARNm.

Bref, si on reprend la petite séquence plus haut et qu'on y applique le code génétique, on aura la protéine suivante :

de l"ADN à la protéine...

En vrai, la machinerie cellulaire va lire l'ARNm codon par codon et à chaque codon, va ajouter à la protéine l'acide aminé correspondant.

Pour finir, deux définitions. Quand on copie la séquence d'un gène de l'ADN vers l'ARNm, on appelle ça la transcription, tout simplement car on retranscrit un texte d'un support à un autre, sans changer quoi que ce soit. Par contre, le fait de fabriquer une protéine à partir de l'enchainement des codons s'appelle la traduction, tout simplement parce qu'on va traduire une information, un texte, d'une langue (l'ADN) à une autre (la protéine).

Voilà, c'est fini pour ajourd'hui. La prochaine fois, je vous parlerai de la structure des gènes et de leur régulation (comment on allume ou éteint un gène...)
Bonne fin de semaine.

jeudi 30 janvier 2014

Les seins d'Angelina

Petit article expliquant la récente affaire d'Angelina Jolie et de son traitement préventif anti-cancer assez radical doublé d'une tentative crasse d'attirer des lecteurs par un titre accrocheur, voire racoleur (je ne suis pas le premier à user de cette ficelle).

- C'était quoi, ce bazar autour de la poitrine d'Angelina Jolie il y a quelques temps ?
Et bien tout simplement La femme préféré de Brad Pitt a choisi un traitement préventif anti-cancer assez direct puisqu'elle s'est fait retirer les deux seins (oui, de manière préventive).

- Et pourquoi ce traitement ?
Tout simplement parce qu'à la suite d'un test génétique, elle a découvert qu'elle était porteuse d'une forme mutée du gène BRCA1, forme mutée qui lui conférait un risque important (87%) de développer une tumeur mammaire.
Je m'explique.

Une cellule du corps humain peut être vue comme... une voiture (Fiat Punto, Peugeot 405, Porsche 911, enfin prenez ce qui vous arrange), avec les différents composants de la voiture (éléments du moteur, roues, volant, joint de culasse, etc...) étant les protéines issues des gènes qui sont dans le génome (j'en parlerai un autre jour des gènes).
Quand tout va bien, tout va bien (quelle phrase !) Je veux dire pas d'accident (enfin sauf ceux causés par, au hasard, un météorite qui vous tombe dessus alors que vous roulez pépère sur la départementale 387, mais ça, ce serait vraiment pas de bol alors on oublie).
Dans notre métaphore bagnolistique, quand un élément de la voiture ne va plus fonctionner et la voiture va aller se planter dans un platane. Dans le corps humain, si dans une cellule un gène est muté, la cellule ne va plus fonctionner normalement et elle peut devenir cancéreuse, c'est à dire qu'elle commence à se multiplier sans vergogne et sans aucun contrôle, ce qui ne va pas être très glop pour le monsieur ou la madame.
Ces gènes qui peuvent causer des cancers quand ils sont mutés sont appelés gènes de prédisposition.

- Mais alors pourquoi elle a fait cette mastectomie ? Prédisposition veut dire qu'elle allait avoir un cancer à coup sûr ?
Oulà non ! Prédisposition veut dire ce que ça veut dire, à savoir risque accru mais pas sûr à 100 %. 
Maintenant, il faut comprendre que selon le gène en question, le "risque d'accident" est plus ou moins fort selon le rôle dudit gène dans la cellule. Imaginez une voiture dont le phare arrière gauche est un peu faible, ça devrait pouvoir passer. Mais si le volant ne marche plus, et bien il y a de grandes chances que la route se termine avec le platane. Non pas celui-là. Oui, celui-là, plutôt.
Dans les cellules c'est pareil. Si un gène produit une protéine centrale du processus cellulaire, les risques deviennent important. Dans le cas d'Angelina Jolie, comme indiqué plus haut, ce risque était de 87 %.

- Comment on mesure ce risque ?
De deux façons. Il faut commencer par connaitre le rôle des différents gènes et de leurs versions "saines" ou "mutées" dans le cancer. Pour cela on va prendre non pas des humain mais des souris et des rats et on va y faire muter le gène correspondant pour regarder ce qui se passe au niveau de la bestiole mais aussi au niveau cellulaire et moléculaire (rôle précis dans la cellule, interactions, etc...).
Ensuite on compte. On prend les patientes qui développent le type de cancer en question et on compte combien ont la version mutée du gène. On regarde chez ces patientes si les cancers sont agressifs ou non, quelle proportion de patientes survivent ou meurent. Et avec tout ça on arrive à un pourcentage qui correspond au risque de développer le cancer en question sachant que le gène est muté.
On ne va pas faire le test génétique au hasard. On le fait s'il y a une histoire familiale suggérant la présence d'un gène muté. Dans le cas d'Angelina Jolie, plusieurs femmes dans sa famille sont morte de ce cancer.

- Pourquoi tout ce bazar en fait ?
Déjà parce qu'il ne s'agissait pas de Germaine Brouchu, caissière au Monoprix de Glaviotte-Lès-Vallons (qui malgré la vie trépidante qu'elle a eu, n'a jamais intéressé les magazines pipoles) mais d'Angelina Jolie, l'une des moitié les plus célèbres de ce monde médiatique.
Ensuite parce qu'à la faveur d'une tribune publié dans le New York Times (le 20 Minutes local) expliquant son choix et révélant le prix exorbitant du test génétique du au brevet sur le gène BRCA1 détenu par la compagnie Myriad Genetics. Ledit brevet entraine un prix élevé au test génétique et limite fortement les recherches sur le gène et les mutations. Par exemple, impossible de développer et de vendre un test génétique alternatif, plus efficace et moins cher.

- Comment ça un brevet sur un gène ? Je croyais qu'il était interdit de breveter le vivant ?
Oui c'est vrai que c'est interdit. Une séquence complète ou partielle du génome d'une bestiole vivante et naturelle (c'est à dire non-artificielle) ne peut pas être breveté. Myriad Genetics contourne simplement (et ingénieusement d'ailleurs) cette règle de la façon suivante.
Pour étudier un gène (ou une séquence d'ADN naturelle en général), vu qu'on ne peut pas le faire directement, il faut l'isoler, de même que pour étudier le joint de culasse, il faut l'isoler du bloc moteur. Et bien on le fait à l'aide de technique moléculaires assez simples mais qui passent par une construction artificielle et non-naturelle. C'est cette construction que Myriad Genetics a breveté il y a 20 ans. Pour information, la court suprême des U.S.A. a considéré il y a peu que ce brevet était abusif et que le seul fait d'isoler une séquence d'ADN ne justifiait pas la brevetabilité d'une séquence d'ADN naturelle.

- Donc Myriad, c'est un peu des salauds quand même...
Dans un sens oui. On peut dire que ce sont des business men, qui ont une vision très marchande du vivant. Pas une vision qui ira loin...

mardi 7 janvier 2014

Le génome : le livre de recettes d'un organisme, 2ième partie : les chromosomes

Après la première partie sur qu'est-ce que c'est qu'un génome, voici logiquement la deuxième (je ne veux aucun commentaire su ma fréquence de publication).

On a vu précédemment de quoi était faite une molécule d'ADN, les éléments qui la composent. On va voir maintenant comment tout ça se présente dans une cellule humaine, de chien, de poulet, d'arbre, etc...

Une cellule, typiquement, c'est pas très gros. Il y en a des plus ou moins grosses, mais une cellule de peau va faire typiquement dans les 30 micromètres (µm, il en faut un million pour faire un mètre). Le noyau, lui, va faire dans les 6 micromètres.

Cellule très schématisée
Une cellule eucaryote (en gros, tout ce qui va des levures type levures de bière à nous en passant par les mouches, les vers de terre, etc) se compose d'un noyau et d'un cytoplasme, le tout entouré d'une membrane (qui n'est pas schizophrène mais double, mais ça on le verra une autre fois). C'est dans le noyau que le génome va être stocké et nul par ailleurs. En

Un génome, d'ailleurs, ça fait quelle taille ? Encore une fois, prenons le génome humain comme référence. La longueur d'une paire de bases est estimée à environ 0,34 nanomètres (nm, c'est pire que les micromètres puisqu'il en faut un milliard pour faire un mètre), ce qui ne pèse pas très lourd, vous allez me dire, par rapport à la taille de la cellule, on a un peu de Homer de marge.

Mais dans le génome humain, il y en a deux fois trois milliard de ces paires de bases (six au total, le compte est bon) ! Ça fait beaucoup, surtout quand on regarde la longueur totale de toutes ces paires de bases : 0,34 * 6 milliards ≈ 2 milliards de nanomètres = 2 mètres.

Essayer de visualiser ça : dans chaque cellule de votre corps, il y en a pour 2 mètres d'ADN...

Bon, maintenant, le plus important : comment faire rentrer tout ça dans la cellule. Comment diable faire rentrer 2 mètres d'ADN dans un noyau à peu près 300 000 fois plus petit. C'est un peu une variante du problème rencontré à chaque départ en vacances par beaucoup de vacanciers ("comment faire rentrer trois tonnes de valises dans cette petite Mini Cooper").

Déjà, tout ce matériel génétique n'est pas "concentré" en une seule molécule, mais en plusieurs. Ce sont les fameux chromosomes. Ensuite, dans chaque chromosome, l'ADN va être compacté, compressé sur lui-même assez simplement en fin de compte.

En fait, une hélice d'ADN peut être vue un peu comme un brin de ficelle.
une ficelle bleu
Ça veut dire que l'ADN n'est pas rigide mais peut se tordre, s'enrouler. Ce qui va nous simplifier la tâche. On va voir comment est compacté l'ADN dans une cellule lambda.

La première étape consiste à enrouler l'ADN autour de structures protéiques (plusieurs protéines mises ensemble) nommées histones.
de l'ADN enroulé autour d'un histone
Autour de chaque histone, le brin d'ADN va faire 1,65 tours représentant 147 paires de bases. Chaque histone est constitué de 4 sous-unités (H3, H4, H2A et H2B de leurs petits noms).
les 4 sous-unités d'un histone
 En répétant ceci beaucoup de fois pour l'ADN, on va obtenir une structure qu ressemble à un collier de perle.
un cadeau original pour votre chère et tendre...
Efficace.
La suite va dépendre de la région du génome dans laquelle on se trouve et si celle-ci est active ou non, plus précisément si les gènes situés dans ladite région sont actifs ou pas. Un gène actif doit pouvoir être accessible à la machinerie cellulaire. Pensez aux bagages de ma grand-mère. Si le casse-croute est planqué au fond de la valise, ça va être difficile d'y accéder à l'heure de la pause midi. C'est pareil pour différentes régions du génome. Ce qui sert va rester dans cette configuration collier de perles, ce qui ne sert pas va être encore condensé.

Cela est fait de manière assez simple. Comme pour la ficelle, si on tourne les deux bouts dans des sens opposés, elle va s'enrouler sur elle-même. Idem pour l'ADN, celui-ci s'enroule autour de lui-même. Prenez un câble ou une corde (vous en avez surement à porté de main) pour essayer, c'est aussi simple.

Et voilà comment on réussi à faire rentrer le vélo, les raquettes de tennis et les valises dans la voiture plusieurs mètres d'ADN dans un tout petit noyau d'une toute petite cellule.

mardi 15 octobre 2013

L'académie Nobel se fiche pas mal du travail de paillasse (et elle a tord)

 Petit billet explicatif sur le récent prix Nobel de physique, encore sous forme de question réponse.

- Alors, que c'est-il passé la semaine dernière ?
Et bien, c'était la semaine des Prix Nobel, la semaine de l'année (deuxième d'octobre je crois) pendant laquelle sont remis les Prix Nobel. Historiquement, il y en a cinq, physiologie et médecine, physique, chimie, littérature et paix (je laisse de coté l'économie).

- Et qui a été récompensé cette année en physique ?
Le belge François Englert etle britannique Peter Higgs pour leurs travaux sur la physique des particules et sur les particules sub-atomiques (plus petites qu'un atome).

- Higgs ? Ça me dit quelque-chose...
Votre mémoire est bonne. Peter Higgs a donné son nom à une particule particulière, le boson de Higgs. Il s'agit d'une particule fondamentale qui, si je me souviens bien, est censée donner de la masse aux objets (non, la physique n'est pas mon domaine de prédilection).

- Et leurs découvertes n'ont pas eu assez d'impact sur la physique ?
Au contraire ! Les travaux récompensés sont primordiaux pour la compréhension du monde qui nous entoure. Vous expliquer pourquoi et comment dépasse largement le cadre modeste de mes humbles compétences, mais si l'anglais ne vous rebute pas, il faut aller voir cette vidéo qui est tout simplement géniale.

- Alors qu'est-ce qui cloche ? Les scientifiques récompensés ne méritent-ils pas le prix ?
Si, ils le méritent amplement par le fait simple qu'ils ont posé un modèle, le modèle qui décrit les particules sub-atomiques. La simple découverte du boson de Higgs est un pas significatif dans la compréhension du gros maelström qui nous entoure.

- Attendez, il y a bien quelque-chose qui cloche alors avec ce prix ?
Oui, un petit quelque-chose mais qui en dit long sur le Prix Nobel et sur le fonctionnement de la science.
Les deux savants nommés plus haut ont donc posé un modèle sur du papier et rien de plus ou presque. Le modèle fonctionne sur papier (sinon il n'aurait jamais été considéré sérieusement) mais ça s'arrête là. Certaines choses très importantes (dont le boson de Higgs) sur le papier n'avait pas jusqu'à plus ou moins récemment été observé en vrai dans la nature.

- Ah. Et ?
Et bien il a fallu prouver l'existence de ces particules, notamment du boson de Higgs.

- Ah oui, et c'est à ça qu'a servi le gros accélérateur de particules à coté de Genève !
Oui, le Large Hardon Collider (LHC pour les intimes). C'est un gros accélérateur de particules donc, qui marche comme ceci : on accélère des particules à des vitesses énormes, on les fait rentrer en collision et on regarde ce qui en sort (un peu comme si on crashait deux voitures l'une contre l'autre pour confirmer l'existence du joint de culasse). Il faut savoir que ce LHC et a été une énorme entreprise, une collaboration entre plusieurs pays, des milliers (oui oui, des milliers) de personnes travaillant sur place sur cette grosse expérience.

- Donc l'accélérateur a fait son boulot, les scientifiques aussi, où est le problème ?
Le problème est que l'académie des Prix Nobel n'a récompensé que les deux théoriciens cités plus haut. Et eux seuls. Les travaux effectués au LHC ont bien été mentionné mais seulement mentionné. Ce que semble considérer l'académie des Prix Nobel est que le travaille expérimental, de paillasse, compte moins que le travail théorique. Un deux poids deux mesures qui est un peu dur à avaler.

- Alors il aurait fallu que le Prix aille aussi au LHC ? Pourquoi cela ne s'est-il pas fait ?
Pour plusieurs raisons. Déjà, le LHC est le nom de la machine, l'organisme qui gère tout ça est le CERN (Organisation Européenne pour la Recherche Nucléaire). Ensuite, le CERN ne pouvait pas se voir décerner le Prix car les Prix Nobel scientifiques ne vont qu'à des personnes, pas à des organismes.

- Ah bon ?
Et oui. C'est Alfred Nobel himself qui a posé ces règles quand il a créé les Prix. Il faut dire qu'à l'époque (tout début du 20ième siècle quand même), les grands noms de la science faisait tout eux-mêmes. Ainsi Pierre et Marie Curie étaient aux fourneaux pour touiller la matière et chercher le radium en plus d'être devant le tableau noir pour modéliser tout ça. Entre cette époque et maintenant, la science a pas mal changé et il est rare de voir ceux qui dirigent des équipes mettre eux-même la main à la pâte. Ils sont là pour diriger les recherches, orienter les travaux et chercher de l'argent tandis que les étudiants en thèses et post-doctorants passent leur temps les mains dans le cambouis. De même, les découvertes et avancées fondamentales de nos jours se font à l'aide de moyens techniques assez considérables et il est impossible de tout faire soi-même.
Un exemple récent est le séquençage du génome humain. C'était un consortium de beaucoup de laboratoires, beaucoup de personnes, de moyens, de machines. Même s'il y avait un homme qui dirigeait le projet, il ne pouvait pas à lui seul recevoir tous les lauriers quand le projet fut complété.

- Donc il faudrait changer les règles du Prix.
Pas forcément (et j'imagine que c'est très compliqué). Cette histoire met juste en lumière le fait que la science, la façon dont les découvertes sont faites, dont le travail de base est fait, a bien changé depuis un siècle, en bien ou en mal c'est un autre débat. La légende encore vivace je crois et propagée par les Prix Nobel du chercheur seul dans sont petit laboratoire isolé révolutionnant seul ou presque la science est loin, bien loin de la réalité.

Ceci étant dit, cela ne me déplairait pas d'en gagner un...

dimanche 28 juillet 2013

Les cellules souches are back !

Petit billet explicatif sur un actu déjà vieille de plusieurs jours sous forme de question - réponses ayant pour thème les cellules souches, donc.

- Alors, que c'est-il passé il y a peu ?
Le parlement français a voté une loi autorisant la recherche scientifique sur les cellules souches embryonnaires humaines.

- Ah, ce n'était pas autorisée ?
Et bien non, logiquement ai-je envie de dire. À la différence d'autres pays (le Royaume-Unis par exemple), celle-ci n'était pas en principe autorisée  en France. Je dis en principe car il était possible d'obtenir des dérogations, sous réserve de prouver que la recherche proposée était d'une importance capitale (au hasard ayant un impact dans le domaine de la santé) et qu'aucune alternative n'était proposée.
En fait, on est passé d'un système "non sauf..." à un système "oui". Mais attention, et j'insiste là-dessus, l'utilisation des cellules souches et toujours bien réglementée ! Les recherches effectuées doivent toujours obéir aux règles évoquée ci-dessus (importance de la recherche et absence d'alternative).

- D'où proviennent ces cellules souches ? On va au supermarché pour se les procurer ?
Oulà, non (et heureusement) !
Ces cellules sont extraites d'embryons. Ces embryons proviennent de fécondations in vitro et dont on a plus besoin. Je m'explique.
Quand on fait une fécondation in vitro, c'est un peu comme faire ses bagages pour partir en vacances ou faire de la cuisine pour un dîner avec des amis, il faut toujours prévoir plus. En effet le processus ne marche pas à 100 % et c'est bien d'avoir des embryons si on doit recommencer. Quand le processus réussit, les embryons qui restent sont voués à être détruits. Et bien au lieu de ça, on les récupère pour les utiliser dans la recherche.

- Donc, pas de clonage humain pour faire des embryons cobayes ?
Non, pas du tout !
La façon dont on récupère ces embryons est bien règlementée et ne va en rien changer au vu de la nouvelle loi.

- Mais au fait, c'est quoi une cellule souche ?
Ah, enfin !
Une cellule souche est une cellule qui n'est pas différentié (par exemple, un neurone ou un globule rouge sont des cellules différentiées) et qui a le potentiel de se différentier en plusieurs types cellulaires. Imaginez les éléments essentiels d'une voiture (roues, volant...) assemblés mais sans qu'il y ait de structure autour donnant à la voiture une forme et une fonction particulière : il y a tout ce qu'il faut pour fonctionner mais on peut encore choisir ce qu'on va en faire. Une Peugeot 205 va être comme une cellule différenciée, avec une forme et une fonction bien précise et qui ne peut pas revenir en arrière.
Il y a plusieurs types de cellules souches selon le degré d'avancement de la différentiation. En premier, il y a la cellule souche embryonnaire, directement issue de la cellule-œuf obtenue après fécondation de l'ovule par le spermatozoïde. On la dit totipotente (toti qui vient de tout et potente qui vient de pouvoir) car elle peut tout faire, à la fois tous les types de cellule d'un organisme et ce qui sert à le fabriquer durant la grossesse (le placenta par exemple). Le niveau après est la cellule pluripotente, qui peut fabriquer tous les types cellulaire d'un organisme, mais pas ce qui sert à le fabriquer.

- Qu'est-ce qui arrive à ces cellules souches ?
Soit elles s'auto-renouvellent et gardent leur potentiel de différentiation, soit elles se différencient en cellules "moins" souches ou en cellules complètement différenciées (comme les neurones ou les cellules de muscle vues plus haut). Ce qui change alors, c'est la façon dont elles fonctionnent, les gênes qu'elles expriment et à quel moment. Un truc sur la différentiation est qu'elle est irréversible, un peu comme une bille qui dévale une pente, elle ne peut qu'aller plus bas.

mardi 4 juin 2013

Le génome : le livre de recettes d'un organisme, 1ière partie: l'ADN

Ceci est le premier message d'une série sur l'ADN, le génome, tout ça... Le but du jeu est ici d'expliquer le plus simplement possible ce qu'est de l'ADN, un génome, de quoi parle-t-on quand on évoque toutes ces choses, etc... Si quelque chose n'est pas clair, mal expliqué, confus, n'hésitez surtout pas à me demander.

Donc l'ADN...

Prenez un organisme vivant (n'importe quel organisme vivant) :
une vache,

une vache
un chien,

un chien
un arbre,

un arbre
une bactérie,

un humain (vous ou moi),


un point commun à toutes ces bestioles est que toute l'information nécessaire à fabriquer et maintenir en vie cette bestiole est contenue dans le génome. Le génome est le livre de recettes (le plan de fabrication) d'un organisme.

la Bible


Ce qui nous intéresse aujourd'hui est comment toute cette information, toutes ces recettes sont stockées, quel est le support physique de tout ça. En gros, c'est quoi le papier et l'encre du livre de recette.

C'est une molécule qui tient ce rôle, molécule au doux nom d'Acide DésoxyriboNucléique (ADN pour faire simple). Ce nom n'est pas du tout un nom barbare mais désigne la composition de cette molécule, ses sous-parties. On va décomposer tout ça, vous allez voir, c'est super simple en fait.

Donc au départ il y a une chaine constituée de sucres, c'est à dire des molécules de sucres qui vont se suivre pour faire une grande chaine et liés par du phosphate. Chaine qui au final peut se représenter simplement comme suit :


De cette chaine vont dépasser à intervalles réguliers des bases ("bases azotées" en vrai, mais on dit juste "bases" pour faire simple) :


Il y a quatre différentes bases qui portent respectivement les noms de : Adénine, Thymine, Guanine et Cytosine, que l'on nomme généralement par leurs initiales (encore une fois, pourquoi se compliquer la vie) : A, T, G et C. La chaine plus les bases forment un brin d'ADN.
Ce brin a un sens (un peu comme droite gauche dans une ligne de texte du livre de cuisine). Ce sens est donné par l'orientation des molécules de la chaine de sucre. Pour faire simple, au lieu d'avoir gauche / droite, on a 5' (cinq prime) / 3' (trois prime).



L'ADN est une double-hélice. Concrètement, comment on arrive à ça à partir de notre brin ? Tout simplement en prenant deux et en les liant l'un contre l'autre. Pour ça, on va se servir des bases comme aimant pour lier les deux brins. On dit que deux bases vont s'apparier.


2 choses. D'abord l'ordre des deux chaines est très important : ils doivent être anti-parallèle. C'est à dire qu'en face du coté 5', il doit y avoir le coté 3', et lycée de Versailles.


Ensuite,  les bases ne s'apparient pas du tout au p'tit bonheur la chance. Un A doit toujours être avec un T, et un G toujours avec un C (et quand je dit toujours, c'est toujours). Mais pourquoi donc, me direz-vous ? Et bien pour reprendre l'image des aimants indiquée plus haut, les bases A et T forment une catégorie d'aimants, et les bases G et C une autre, mais qui ne sont pas interchangeable. C'est une histoire d'arrangement de molécules, mais on peut représenter ça comme ci-dessous :

On voit bien sur cette image que seuls A et T peuvent aller ensemble et que seuls G et C peuvent aller ensemble (un peu comme un Roméo et sa Juliette, ou bien un Jack et sa Rose).
Donc, quand on va voir deux brins appariés, on va voir un truc comme ça :

Pour terminer et obtenir une belle double-hélice, ces deux brins se tordent sur eux-même :



En regardant le deuxième schéma ci-dessus, on peut voire que l'information contenue dans les deux brins est redondante : on peut aisément retrouver les bases d'un brin à partir de l'autre en se servant des appariements spécifiques (un A avec un T, un G avec un C). Donc, par économie, on ne va en représenter qu'un :


qui plus est, sans la chaine de sucres, qui ne contient aucune information. Ne restent que les bases, que l'on représente à l'aide de leurs initiales. Reste donc :

Un morceau d'ADN comme ci-dessus va être désigné sous le nom de séquence d'ADN. Elle peut être plus ou moins longue et contenir différents types d'information, mais ça, on en parlera une prochaine fois.

Un avantage certain à cela (et ça aussi, je vous en parlerai une prochaine fois), c'est qu'une séquence d'ADN peut être vue comme une suite de lettre, de A, T, G et C. Ceci permet d'analyser l'information contenue dans une séquence assez facilement.

Voilà, fin de cette toute première partie, en espérant que ça vous a plu.
À bientôt.

lundi 20 mai 2013

La recherche expliquée à ma mère

Rubrique où j'explique simplement des faits scientifiques, anciens ou nouveaux, le plus clairement possible. N'hésitez pas à commenter si quelque chose n'est pas clair !